Au-delà de l'Agora des Compétaliastes, s'étend au Sud un vaste quartier marchand. Mais il est peu homogène. Le secteur de la Pointe des pilastres mélange locaux utilitaires et demeures privées. Au point qu'il n'est pas évident de déceler, avec le même aplomb que les fouilleurs du début du siècle, la vocation commerciale de tous les édifices sur cette partie du rivage. Jouxtant le Magasin aux colonnes, celui à la Baignoire est "ainsi nommé d'une belle baignoire en marbre inachevée (tenons de bardage qui devaient être ultérieurement soit ravalés, soit sculptés) qu'on a trouvée dans le vestibule ; sans doute s'agit-il d'une marchandise en transit qui, pour une raison inconnue, n'est jamais repartie". Cette suggestion serait sans importance si, appuyée sur le lieu de trouvaille et l'inachèvement apparent de l'objet, elle ne désignait cet établissement comme un magasin. Cette encombrante baignoire n'a pas toujours été "en transit". Lors de sa découverte, comme le montre une photographie ancienne, elle était encastrée dans un mur, à la façon des modernes équipements de nos salles de bain. C'est au moment de la fouille que le muret a été démoli. Rien n'indique d'autre part que ce "vestibule" était l'entrée unique de cet ensemble, car dans le plan originel, il y avait au moins un autre accès. Il reprend une forme spécifique de la maison privée hellénique, décrite par Vitruve, le locus inter duas januas, un couloir fermé par deux seuils qui ouvraient l'un sur la rue, l'autre sur la cour. Il n'est donc pas à exclure que cette baignoire ait eu un usage domestique.

    La fonction de stockage de l'établissement de la Pointe des pilastres ne fait, elle, pas de doute. Ce grand édifice, de plus de trente mètres en façade, ne comporte pas d'étage et s'adapte par une série de paliers à la déclivité naturelle. Des couloirs parallèles déterminent la distribution des aménagements intérieurs. Ces passages dallés ouvrent sur des pièces disposées latéralement, munies chacune d'un système de clôture plus ou moins complexe. L'ensemble, qui rappelle les "horrea" romains, comme ceux d'Ostie, a connu au moins deux états dont le plus ancien date du second siècle avant notre ère. La façade de granit est en effet un habillage de la structure initiale au moment d'un agrandissement des locaux et d'une extension du quai, un phénomène qui se retrouve tout au long de ce littoral sud.