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La collection qu'avait constituée à Marseille Aymé du Boisaymé contenait pourtant bien une oeuvre délienne. Elle ne sera publiée qu'en 1912 par Louis Stouff. Celui-ci venait d'acheter à Monsieur Deloche deux ins-criptions que ce petit-neveu du chef des douanes marseillaises abritait désormais dans sa villa de Meylan, près de Grenoble. C'étaient ce fragment de catalogue athénien et une consécration faite à Apollon par Philippe V de Macédoine à l'occasion de jeux. On ne peut douter cette fois de l'origine de ce texte gravé sur une pierre bleuâtre. Cyriaque d'Ancône l'avait copié entre 1426 et 1431, lors de son séjour délien. Le bloc, aujourd'hui mutilé dans sa partie droite, était alors intact. Notre pèlerin l'avait vu près du Lac sacré, c'est-à-dire, à quelque distance du temple d'Apollon. Ce n'est pas là cependant que ce marbre fut trouvé au XIX siècle. Louis Stouff a fait connaître deux notes manuscrites accompagnant l'inscription au moment de son achat. S'il faut leur accorder quelque crédit, elles indiquent que cette dédicace "était placée sous le petit portique situé vis-à-vis la face orientale du portique de Philippe et séparé de lui par la voie sacrée". Ce témoignage contestable, mais plausible, fixe en tout cas une date pour cet enlè-vement, 1817, et en rend responsable le "capitaine de vaisseau De Meslé". La vérité n'échappe jamais tout à fait à un douanier !
La collection Choiseul-Gouffier : Délos à Marseille ?
Si l'on en croit le vieux, mais toujours utile, Catalogue des Antiquités Grecques et Romaines du Musée de Marseille qu'établit W. Froehner en quelques journées de l'automne 1883 , le Musée Borély possède deux oeuvres déliennes. Ce sont un autel inscrit à bucranes et un support trapézoïdal dont les trois faces sont décorées de bas-reliefs représentant Léto, Apollon et Artémis.
L'origine géographique de ces pièces est discutée ; nul ne conteste cependant qu'elles appartenaient la collection du Comte de Choiseul-Gouffier et ne sont aujourd'hui marseillaises que par hasard. Ou presque. Il faut ici rappeler comment l'ambassadeur du Roi à Constantinople, qui prit sa charge en 1774, se constitua un cabinet d'antiques dont la plus grande part est maintenant au Louvre. Son Excellence profitait des services d'un agent zélé, Louis-François-Sébastien Fauvel qui recherchait les marbres les plus précieux et exécutait des moulages de ceux qu'il ne pouvait acquérir. S'il ne les expédiait pas à Constantinople, il les envoyait en France où ils étaient centralisés à Marseille. C'est dans toute la Grèce que son zèle se déploya. Délos ne fut pas épargnée. On lit dans une lettre malheureusement sans indication de date et fragmentaire : "J'ai fait aussi le plan de Délos ; j'y ai fouillé ; beaucoup de choses avaient échappé aux voyageurs". Et Fauvel raconte qu'il a mesuré les débris du colosse des Naxiens et remarqué plusieurs monuments inédits. Le Cabinet des estampes de la Bibliothèque Nationale a conservé plusieurs des croquis et dessins, levés lors de l'un de ses séjours. Le Comte de Choiseul-Gouffier s'était rendu lui-même dans l'île d'Apollon, le 1 juin 1776, et a donné de cette excursion un récit détaillé, bien que dépourvu de toute originalité. Point de doute non plus que Fauvel puisa dans "ces superbes débris qui attesteront encore longtemps [l']ancienne magnificence de [Délos]". C'était répondre au voeu du Comte, voeu constant puisqu'en 1791, dans une lettre datée du 4 janvier, il lui ordonnait de gagner Santorin, pour y "prendre une douzaine de terrassiers et les conduire à Délos, où mon fils [celui du Comte] assure qu'il y a plusieurs jolis autels et beaucoup de bon marbre à prendre". On ne sait le succès de l'expédition. Mais Fauvel s'était sûrement exécuté, comme en témoigne cette lettre relatant une catastrophe : "14 caisses [des moulages rapportés d'Athènes]... , des objets en marbre trouvés à Délos, une statue en marbre ont été consumés dans l'incendie de Smyrne". Le feu qui ravagea partiellement la ville en 1797 n'était qu'un épisode romanesque de plus dans la constitution de la collection Choiseul-Gouffier.
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