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LA COLONISATION GRECQUE






    Sources littéraires et données archéologiques s'accordent pour reconnaître que, dans ce grand mouvement de fondations, un rôle pionnier revint aux Eubéens : Chalcidiens et Erétriens. Déjà présents dans les Cyclades, à Zagora d'Andros notamment, actifs au Proche-Orient, à Chypre comme sur la côte syrienne, dans le comptoir d'Al Mina, poussés par la recherche de métaux, ils s'installèrent dès avant 750, dans l'île de Pithécusses, aujourd'hui Ischia dans le golfe de Naples. Avec Cumes fondée en face sur le continent moins de deux générations plus tard, ce centre de transformation du minerai de fer venu d'Etrurie et de l'île d'Elbe fut longtemps la position grecque la plus avancée en Occident. Si les Erétriens durent céder aux Corinthiens Corcyre (Corfou) et perdirent bien des forces dans la guerre lélantine qui les opposa à leurs voisins chalcidiens, ceux-ci réussirent à se constituer un réseau serré de colonies leur donnant le contrôle, avec Zancle et Rhégion, du détroit de Messine, puis d'une partie de la côte orientale de la Sicile, avec Naxos, Léontinoi et Catane. De leur côté, et presque dans le même temps, les Corinthiens fondèrent Syracuse, tandis que les gens de Mégare colonisaient Thapsos, puis la quittaient pour s'établir à Mégara Hyblæa. Au début du Livre VI de son Histoire de la Guerre du Péloponnèse, dans un tableau de la Sicile archaïque que les travaux des archéologues ont plus nuancé que démenti, Thucydide cite quelques noms d'oikistes, de fondateurs, comme Thouklès, Evarchos ou Lamis et rappelle les développements souvent laborieux de ces implantations. Mettant à mal les populations indigènes, elles obligèrent également les Phéniciens à l'abandon de plusieurs sites côtiers et au regroupement de leurs forces au voisinage des Elymes à Motyé, Soleios et Panorme (Palerme).

    Dès la fin de ce VIIIe s. av. J.-C., l'emprise grecque s'était déjà affirmée sur le golfe tarentin, à Tarente, la seule colonie lacédémonienne, à Sybaris et Crotone, deux fondations péloponnésiennes. Vers 675, et peut-être plus tôt, naîtront Locres, Géla et Siris. L'attrait d'une "nouvelle frontière", ces terres de Sicile et d'Italie du Sud que la tradition antique appela Grande-Grèce, donnera un second souffle à la colonisation. Elle recrutera non seulement en Grèce continentale, mais dans les Cyclades et sur la côte d'Asie Mineure. Sans parler du Pont-Euxin, fief de Milet, elle élargira ses horizons. Elle s'épanouira tant au Nord sur les côtes de la Thrace, en Chalcidique, dans l'île de Thasos, dans l'Hellespont, la Propontide et le Bosphore que, vers le Sud, en Egypte, à Naucratis, dès 650, et sur la côte lybienne, dans l'île de Platéa d'abord, puis à Cyrène vers 630. Ce mouvement sera amplifié par l'action des premiers colons essaimant à leur tour. Ceux de Syracuse s'implanteront à Akrai, Kasmenai et Kamarina. Un siècle après avoir vu le jour, Mégara Hyblæa fondera Sélinonte. De Géla partiront en 580 les fondateurs d'Agrigente. Au Nord de l'Epire, les efforts conjugués de Corinthe et de Corcyre aboutiront à la création d'Epidamne (627) et d'Apollonie (600).