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"Du rivage, il assiste avec tristesse au déchargement des navires qui portent le butin de Péloponnèse.
Dépouilles grecques, butin de Corinthe...
Certes le jeune Grec d'Italie ne peut ni ne doit aujourd'hui trouver du goût au plaisir".
Cimos, fils de Ménédore, pleure la cité corinthienne pillée par les armées romaines du général Mummius en 146 avant notre ère. Il sait que le philhellénisme a de beaux jours devant lui, mais que la Méditerranée n'est déjà plus grecque. Telle est la leçon de "Sur une côte d'Italie", un court poème de Constantin Kavafy (1863-1933), un Grec de la diaspora égyptienne sensible à la permanence de l'influence grecque comme à son effacement dans le monde contemporain. Si l'aventure d'une Méditerranée grecque se termina, comme le pense le poète, avec la prise de Corinthe, elle prit forme au VIIIe siècle avant notre ère avec l'installation de Grecs venus d'Eubée et de Grèce continentale en Italie du Sud et en Sicile. La colonisation commençait.
Mêlant plusieurs peuples dont les Phéniciens, cette conquête d'un autre Far-West - selon le mot de Fernand Braudel - sera pratiquement achevée deux siècles plus tard. Les Grecs auront alors conscience, à tort ou à raison, que cette mer est la leur. Quand Hérodote décrit les mers du monde, il cite "la mer Caspienne, une mer à part sans communication", la Mer Erythrée (la mer Rouge) et "celle que l'on appelle l'Atlantique, qui s'étend au-delà des Colonnes d'Héraclès", notre détroit de Gibraltar. Quant à la Méditerranée qui ne forme avec ces dernières "qu'un seul et même ensemble", point n'est besoin de la nommer : elle est "celle que parcourt les navires grecs". Hérodote ne la qualifie qu'une fois dans ses Histoires. En racontant le périple organisé par le Roi d'Egypte Néchao (609-594 av. J.-C.). Partis du golfe Arabique, des Phéniciens, en trois années, revinrent sur la côte égyptienne par les Colonnes d'Héraclès après avoir fait le tour de l'Afrique et parcouru la mer Rouge, "la mer méridionale", la mer Australe, et "la mer septentrionale", la mer des vents du Nord. Sur la Méditerranée se répand souvent avec violence Borée, ce dieu venu de Thrace.
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