|
|
A la fin de septembre 1673, Nointel entreprit une tournée dans les Échelles pour faire enregistrer ces nouvelles dispositions. L'Ambassadeur qui aimait voyager - sur les neuf années de son ambassade, il en passera cinq loin de Constantinople - partit en grand équipage. Parmi les nombreux religieux de sa suite, figurait le jésuite Robert Saulger, le futur Supérieur de la mission de Naxos et l'auteur en 1699 d'une Histoire nouvelle des anciens ducs et autres souverains de l'Archipel qui fit longtemps référence. L'orientaliste Antoine Galland, le traducteur des Mille et une nuits, devait tenir, en sa qualité de bibliothécaire de son Excellence, un journal ; sa mort brutale au cours de l'expédition y mit fin.
On le continua pourtant. Antoine Des Barres, un gentilhomme champenois, publia en 1678 un État présent de l'Archipel. Cornelio Magni, originaire de Parme, donna entre 1679 et 1692 deux volumes de souvenirs. Ce sont autant de points de vue différents qui s'ajoutent à celui de Nointel. Celui-ci multiplia de son côté les lettres au Roi et à Pomponne, annonça des Mémoires. Pour se délivrer d'un engagement qu'il ne tint finalement pas, il ajoutait : "Si j'ai le malheur de ne pas exécuter ce que je me promets, la peinture y pourra suppléer, en quelque sorte, par le soin que je prends d'occuper deux peintres à la représentation des plantes, arbres, fruits, fleurs, ports de mer, montagnes, villes, îles, points de vue les plus beaux, habillements de chaque lieu dont j'ai voulu prendre aussi les originaux, aussi bien que les animaux, plantes et fruits, médailles et marbres que j'y ai pu rencontrer les plus remarquables". L'un de ces peintres, Rombaud Faidherbe, d'origine flamande, mourut à Naxos. Le second, son compatriote et ami, reste l'Anonyme de Nointel qui, sur le chemin du retour, exécuta un relevé des frises du Parthénon, le seul que nous possédons avant la ruine du temple par les boulets vénitiens en 1687.
A MYCONOS, CHEZ LES PIRATES
Avec un "firman" pour Chio, Nointel poussa au-delà, jusque dans les Cyclades, et justifiera ainsi sa conduite : "La nouvelle que la peste était furieuse à Constantinople depuis mon départ, m'ayant engagé de continuer mon voyage dans l'Archipel, je suis parti de Chio sur le soir, et arrivé, le lendemain de bonne heure, à Myconos".
Par sa position géographique privilégiée, entre les détroits périlleux de Steno et Doro, Andros est le trait d'union naturel entre la côte turque et la Grèce continentale. Mais la petite et sèche Myconos, au débouché du canal qui porte son nom, a toujours été, grâce à la qualité de son port, une escale privilégiée pour qui aborde l'Archipel. C'est encore par elle que débute le plus souvent le voyage des modernes vacanciers. "Nous avions combiné avec soin une tournée dans les Cyclades : Mykonos, Délos, Syra, Santorin". Ainsi commence le plus diffusé des périples dans cette région. Celui que raconte Simone de Beauvoir dans La Force de l'âge : un été grec en 1937 avec Jean-Paul Sartre et Bost. Mais quelle déception à lire son témoignage ! Le touriste tient son carnet : "A Mykonos, nous avons bu un café et regardé les moulins à vent. Un caïque nous a menés à Délos ; la mer bougeait, et j'ai commencé à rendre tripes et boyaux". Pauvres souvenirs de vacances que les Myconiates ont cherché depuis à renouveler en laissant errer un pélican sur les quais !
|
|