Bandeau









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LE TEMPLE DÉTRUIT






    À Tinos, au bas du rivage, dans mon rêve, mon poète fut soulevé d'une grande colère. À l'instant j'appelai mon frère Jean. Vous vous souvenez sans doute, de Jean mon frère. Jean mon frère est un enfant de ma fantaisie. Ma fantaisie sait prévoir beaucoup de choses ; ce qu'elle conçoit et ce qu'elle veut, c'est mon frère Jean qui l'exécute, Jean mon frère, ce géant, qui est grand comme une tour, qui est terrible comme le peuple, généreux comme l'hellénisme. Il comprit ce que je voulais sans que j'eusse un mot lui dire.

    - Viens, fis-je seulement ; moi devant, toi derrière.

    Et nous montâmes sur la colline, à l'église de la Panaya. Mon frère Jean, une seconde, s'arrêta et la peur le secoua.

    - Non, frère chéri, me dit-il, je ne puis faire pareille chose.

    - Je te dis que là n'est pas la religion ; c'est du commerce. Mort à cela !

    Je le menai vers la crypte, sous l'église :

    - Courbe-toi maintenant d'un coup, lui criai-je ; dresse-toi de toute ta taille. Jean mon frère s'est dressé formidablement.

    Ah ! quel désastre ce fut là ! Ce fut plus terrible que si la terre avait tremblé. Les pierres se descellaient et tombaient tout autour, l'Établissement de Tinos s'écroulait ; tout s'effondra et je ne vis plus rien, ni l'église, ni la crypte ; seul, au milieu des ruines, Jean mon frère, debout, regardait le temple détruit avec des yeux d'où coulaient des torrents de larmes.

    Le bruit de cette chute et le tumulte de toutes ces pierres me réveillèrent de mon sommeil. À Corthy, sur le sable du rivage, les petits enfants jouaient toujours et babillaient. J'écoutais et je notais çà et là leur doux parler naturel.