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HEINRICH SCHLIEMANN, L'INVENTEUR DE TROIE






    En 1873 surgira le "trésor de Priam". Son transfert clandestin à Athènes fera scandale. Pour échapper à un procès, Schliemann transigera avec la justice et le gouvernement turcs. Aux 10.000 francs-or réclamés en dédommagement, il en ajouta 40.000 qu'il offrit au Musée Impérial de Constantinople. Il s'estima quitte et propriétaire des objets. En Angleterre, plusieurs associations savantes l'invitèrent. Il en fut flatté. Reçu par Lord Talbot et en présence de William Gladstone, premier ministre de la Reine Victoria, Schliemann devint, avec sa femme, membre honoraire de la Société royale archéologique de Grande-Bretagne. Alors que Sophia allait mettre au monde Agamemnon, le frère d'Andromaque, née sept ans plus tôt, il exposa en décembre 1877 à Londres son trésor.

    La manifestation remporta un grand succès. Schliemann reconnut d'autant moins facilement qu'il s'était trompé sur la datation de ses trouvailles. Loin d'être contemporaines de la date présumée de la chute de la Troie homérique, vers 1250 avant notre ère, elles étaient antérieures d'un bon millénaire. Pragmatique, Schliemann s'attacha les services de l'un de ses détracteurs, Wilhelm Dörpfeld. Il oublia ses propres critiques à l'encontre de celui qui avait exploré Olympie. N'avait-il pas écrit au sujet de la fouille du sanctuaire qu'"enlever une couche après l'autre", c'était "faire tout à l'envers " ? Avant de préciser : Pour ne pas "dépenser un temps et un argent infinis", "on doit aller aussitôt au fond, alors on trouve". Parallèlement à l'aventure troyenne, dès février 1874, Schliemann avait commencé, avec une centaine d'ouvriers et le concours de Sophia, ses recherches dans la citadelle de Mycènes. L'ambition était identique : ressusciter le monde d'Homère en faisant coïncider le texte des épopées, pris comme référence historique, et les vestiges archéologiques.

    Deux ans plus tard, quand du cercle funéraire sortiront les premiers masques d'or, Schliemann sera persuadé d'être face à celui d'Agamemnon. Il écrira à Georges Ier, roi de Grèce : "Avec une extrême joie, j'annonce à votre Majesté que j'ai découvert les tombeaux que la tradition, dont Pausanias se fait l'écho, désignait comme les sépulcres d'Agamemnon, de Cassandra, d'Eurymédon et de leurs camarades, tous tués, pendant le repas, par Clytemnestre et son amant Égisthe. (...) J'ai trouvé dans les sépulcres des trésors immenses en fait d'objets archaïques en or pur. Ces trésors suffisent à eux seuls à remplir un grand musée, qui sera le plus merveilleux du monde, et qui pendant les siècles à venir, attirera en Grèce des milliers d'étrangers de tous les pays". Bien que confondant les mythes et les réalités du terrain, Schliemann faisait mieux que de participer à la révélation de chefs-d'oeuvre inédits. Il ouvrait un champ nouveau aux études grecques, celui de la civilisation mycénienne. Avant lui, l'histoire de la Grèce antique commençait, pour ainsi dire, avec la date des premiers Jeux Olympiques en 776 avant notre ère. Elle prenait maintenant son origine au second millénaire.