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LESBOS






    LESBOS, (Géog. anc.) île de la mer Égée, sur la côte de l'Asie mineure, et plus particulièrement de l'Aeolie. Strabon lui donne 137 milles et demi de tour, et Pline, selon la pensée d'Isidore, 168 milles.

    Elle tenait le septième rang entre les plus grandes îles de la mer Méditerranée. Les Grecs sous la conduite de Graüs, arrière petit-fils d'Oreste, fils d'Agamemnon, y établirent une colonie qui devint si puissante, qu'elle et la ville de Cumes passèrent pour la métropole de toutes les colonies grecques qui composaient l'Aeolide, et qui étaient environ au nombre de trente. Pausanias prétend que Penthilus fils d'Oreste, fut celui qui s'empara de l'île de Lesbos.

    Elle avait eu plusieurs noms ; Pline en rapporte six, et néanmoins il ne dit rien de celui d'Issa, que Strabon n'a pas oublié. Ce mot d'Issa lui venait d'Issus fils de Macarée : le nom de Macaria lui venait de Macarée père d'Issus, et petit-fils de Jupiter, qui y avait sa résidence. Avant Macarée, cette île portoit le nom de Pelasgia, parce qu'elle avait été peuplée par les Pélasges, ses plus anciens habitans. On sait que son nom de Lesbos lui vint de Lesbus, petit-fils d'Aeole, gendre et successeur de Macarée.

    Cette île eut jusqu'à neuf villes considérables ; mais au temps de Strabon et de Pline, à peine en restait-il quatre, Méthymne, Erèse, Pyrrha, et Mytilène, d'où s'est formé le nom moderne de Lesbos qui est Metelin. Voyez METELIN, et MYTILENE.

    Thucydide, l. III. nous apprend que les Lesbiens abandonnèrent le parti des Athéniens, pendant la guerre du Péloponnèse, et qu'ils en furent châtiés rigoureusement. Peu s'en fallut que la sentence qui condamnait à mort tous les mâles de Mytilène au-dessus de l'âge de puberté, ne fût mise à exécution. Par bonheur, le contrordre des Athéniens arriva, lorsqu'on se préparait à cet horrible massacre.

    Lesbos était fameuse par les personnes illustres qu'elle avait produites, par la fertilité de son terroir, par ses bons vins, par ses marbres, et par beaucoup d'autres choses.

    Plutarque nous assure que les Lesbiens étaient les plus grands musiciens de la Grèce. Le fameux Arion, dont l'aventure sur mer fit tant de bruit, était de Méthymne. Terpandre qui remporta quatre fois de suite le prix aux jeux Pythiques, qui calma la sédition de Lacédémone par ses chants mélodieux, accompagnés des sons de la cithare, en un mot le même Terpandre qui mit le premier sept cordes sur la lyre, était lesbien, dit la chronique de Paros. C'est ce qui donna lieu à la fable de publier qu'on avait entendu parler dans cette île la tête d'Orphée, après qu'on l'eut tranchée en Thrace, comme l'explique ingénieusement Eustathe, dans ses notes sur Denys d'Alexandrie.

    Pittacus l'un des sept sages, le poète Alcée, qui vivait dans la 44e Olympiade, l'aimable Sapho, le rhétoricien Diophanes, l'historien Théophane, étaient natifs de Mytilène. La ville d'Erese fut la patrie de Théophraste et de Phanias, disciples d'Aristote : le poète Leschez, à qui l'on attribue la petite Iliade, naquit à Pyrrha. Strabon ajoute aux illustres Lesbiens que nous avons nommés, Hellanicus l'historien, et Callias qui fit des notes intéressantes sur les poésies d'Alcée et de Sapho.

    Si l'île de Lesbos produisait des gens célèbres, elle n'était pas moins fertile en tout ce qui peut être nécessaire ou agréable à la vie, et son sol n'a point changé de nature. Ses vins n'ont rien perdu de leur première réputation : Strabon, Horace, Elien, Athénée, les trouveraient aussi bons aujourd'hui que de leur temps. Aristote à l'agonie, prononça en faveur du vin de Lesbos : il s'agissait de laisser un successeur du Lycée, qui soutînt la gloire de l'école péripatéticienne. Ménédème de Rhodes, et Théophraste de Lesbos, étaient les concurrents. Aristote, selon le récit d'Aulugelle, liv. XIII. cap. v. se fit apporter du vin de ces deux îles, et après en avoir goûté avec attention, il s'écria devant ses disciples : "Je trouve ces deux vins excellents, mais celui de Lesbos est bien plus agréable" ; voulant donner à connaître par cette tournure, que Théophraste l'emportait autant sur son compétiteur, que le vin de Lesbos sur celui de Rhodes.

    Tristan donne le type d'une médaille de Géta, qui suivant Spartien, aimait beaucoup le bon vin ; le revers représente une Fortune, tenant de la main droite le gouvernail d'un vaisseau, et de l'autre une corne d'abondance, d'où parmi plusieurs fruits, sort une grappe de raisin. Enfin, Pline relève le vin de cette île par l'autorité d'Erasistrate, l'un des plus grands médecins de l'antiquité. Le même auteur parle du jaspe de Lesbos et de ses hauts pins, qui donnent de la poix noire, et des planches pour la construction des vaisseaux.

    Voilà quelques-uns des beaux endroits par où l'on peut vanter cette île et ses citoyens. D'un autre côté, leurs moeurs étaient si corrompues, que l'on faisait une grande injure à quelqu'un, de lui reprocher de vivre à la manière des Lesbiens. Dans Goltzius, il y a une médaille qui ne fait pas beaucoup d'honneur aux dames de cette île. M. Tournefort, dont j'emprunte ces détails, ajoute qu'il devait rendre la justice aux Lesbiennes de son temps, qu'elles étaient moins coquettes que les femmes de Milo et de l'Argentiere ; que leur habit et leur coiffure étaient plus modestes ; mais que les unes découvraient trop leur gorge, tandis que les autres donnant dans un excès différent, n'en laissaient voir que la rondeur au travers d'un linge. (D. J.)

    LESBOS, MARBRE DE, (Hist. nat.) marbre d'un bleu clair fort estimé des anciens, dont ils ornaient leurs édifices publics et formaient des vases ; il se tirait de l'île de Lesbos dans l'Archipel.